Bouffée de Conakry - 7

La septième semaine à Conakry:

 

Début insolite et pas très agréable à cause d’une fièvre et d’un état général vraiment affaibli. Lundi matin, après avoir passé une nuit infernale entre le froid et le chaud, je me suis réveillée avec l’idée d’avoir attrapé quelques sales bêtes africaines qui me rendaient si malades. Carol, mon coloc, était dans le même état ; ensemble nous avons réuni nos dernières forces et je ne sais toujours pas avec quelle énergie nous sommes allés à la clinique Ambroise Paré à 700 mètres de chez nous pour faire une prise de sang et découvrir de quelle mort on allait mourir... Ce fut l’attente la plus longue du monde !

Le reste de la journée a été caractérisé par le repos absolu, une visite à domicile de Léa, une amie et en même temps médecin généraliste, qui est passée nous jeter un coup d’œil et nous rassurer. La fièvre, les douleurs et l’apathie ont disparu au cours de la semaine, de façon progressive pour tous les deux, ne retrouvant la vraie forme qu’une semaine plus tard.

Après deux jours de convalescence, je suis retournée à l’hôpital avec beaucoup de culpabilité, j’avais beaucoup de boulot à faire et des projets à débuter et j’étais tombée malade ; bref, pas complètement rétablie mais avec beaucoup de volonté, je suis retournée, prête à tout affronter mais surtout pour bien débuter le projet des hémocultures qui aurait déjà dû être en place depuis des semaines...

Mercredi malheureusement, ce fut une grande déception, malgré ma bonne volonté et mon organisation, je me suis retrouvée toute seule sans matériel ni personnel pour démarrer l’étude. Rien n’était prêt malgré l’anticipation et les avertissements de ma part aux différentes personnes responsables. Je n’étais pas du tout contente, j’étais même très énervée.

Mais après deux mois de Guinée, j’ai bien compris que ça ne servait à rien de s’énerver car c’est la Guinée. La seule chose dont nous avons besoin ici, c’est la patience et la santé, le reste est secondaire.

Le reste de la semaine est passé trop rapidement, entre la clinique, les photos, la réorganisation du Service et l’arrivée de Céline… Trop de choses en très peu de temps.

Pendant le weekend, au cours d’une excursion au marché de Madina en compagnie de Sabrina, j’ai été contactée par une sage-femme française qui travaille ici en Guinée depuis 10 ans et qui m’adressait un patient à l’INSE qui n’était toujours pas né mais ça n’allait pas tarder. Une grossesse tellement désirée après 20 ans de tentatives, des parents dédiés à l’aide aux mères et aux maisons de naissance dans le pays entier. Bref, des Guinéens magnifiques qui se sont retrouvés avec une césarienne en urgence pour la mise en travail spontané mais prématuré du bébé à 35 semaines. J’ai donné mon avis à la sage-femme par téléphone en restant à disposition par la suite. Le bébé a été hospitalisé dans le service de Néonatalogie de l’INSE et, dans l’après-midi du samedi, je suis venue faire une incursion pour voir comment ça se passait dans le Service et comment allaient mes petits patients, y inclus ce nouveau-né arrivé depuis quelques heures dans notre monde. Ce samedi-là, l’hôpital était assez désert, il y avait peu de médecins et d’infirmiers mais le même nombre de patient par contre. Dans ce cas, on ne travaille pas mais on court derrière les malades et les mères pour s’assurer que l’on n’oublie pas les choses à faire. Après avoir aidé un peu dans le Service et avoir résolu des situations urgentes, j’ai examiné le nouveau-né et j’ai pu discuter avec le père, un homme très grand et sérieux qui, samedi après-midi, était très stressé et très inquiet.

La vie parfois n’est pas très juste, mais on pourrait en écrire des livres et en discuter pendant des années...

Le bébé n’était pas en super forme mais j’avais confiance que ça pouvait aller, j’ai essayé de transmettre mes connaissances et mon espoir au papa qui a apprécié et qui fut au final un petit peu rassuré. Le lendemain matin, j’ai reçu un appel de lui qui me demandait quand est-ce que j’avais imaginé passer à l’hôpital pour voir et examiner son bébé car il était lui super stressé. Au téléphone, je lui ai dit que l’équipe sur place était compétente et qu’il fallait lui faire confiance et que je passerai pour contrôler de toute façon plus tard la journée. À mon arrivé, le bébé respirait encore très vite, malgré l’oxygène, mais ne présentait pas de signes d’inquiétude majeurs. J’ai pu, après rencontrer la mère et la sage-femme, rassurer tout le monde, tout en expliquant à la mère combien son lait était important pour le bien être de son bébé, en lui disant que le lendemain on essayerait d’alimenter son bébé si son état respiratoire le permettait.

Ce fut exactement ça ! Après un bon "teaching" de comment exprimer ses seins, la mère toujours très algique a commencé à en produire de plus en plus. Le bébé s’est amélioré dans les jours suivants et la pression familiale qui était montée très haut le lundi a pu redescendre grâce à une conversation de pure sincérité avec le papa qui m’a remercié en s’excusant pour sa pression constante ces dernières 48h.

Entre-temps, Céline, une nouvelle collaboratrice de Souffle2Vie, est arrivée et a atterri directement dans notre coloc car les embouteillages ont paralysé pendant trois jours la circulation en ville. Son aventure en Guinée a donc commencé dimanche soir, arrivée chez nous en "déplacement guinéen" nous rejoignant à notre résidence pour déguster un très bon bu bun vietnamien avec Arthur, Carol et même Amadou. Le lendemain, malgré les manifestations, nous avons décidé d’aller quand même au boulot et de bien débuter la semaine. Ce fut une aventure, mais ça, c’est une autre semaine, du coup un autre chapitre !

À bientôt

 

Paola Valabrega